1. Billet d'Humeur
Au prisme des valeurs portées par les politiques publiques et les courants de pensée actuels, des transformations qui secouent le monde du médico-social, quelques notions se dégagent et interrogent tous ceux qui vivent dans et avec ces mondes liminaires que sont les handicaps complexes, la dépendance extrême, la différence.  

Car de façon parfois déconcertante lorsque l’on parle des personnes polyhandicapées, les notions qui reviennent sans cesse, tout en s'appliquant à des réalités bien différentes, sont l’autonomie, l’autodétermination, la citoyenneté, l’inclusion.  

Il s’agit, certes, de belles et bonnes idées. Mais elles peuvent cacher des réalités moins belles, si on les vide de leur substance intrinsèque, si on ne les ajuste pas aux personnes à qui on prétend les appliquer. 

Vouloir construire un monde pour les personnes polyhandicapées sans s’interroger sur ces notions
Billet_d_hum...
essentielles est une gageure ; elles risquent de s’avérer maltraitantes, plus carcérales que libératrices. Pourtant, au prix d’une vraie écoute de terrain, elles peuvent, loin de toute idéologie validonormée et de tout dogmatisme, révéler un pouvoir réellement épanouissant, permettre à chacun de se réaliser tel qu’il est, au mieux de ses potentialités, de ses besoins, de ses désirs.  

Aujourd’hui, le GPF s’interroge et vous convie à une réflexion partagée sur l’accompagnement spécifique du polyhandicap à l’aune de ces évolutions. Tous les acquis de ces dernières années, particulièrement le regard sur les potentialités des personnes polyhandicapées trop longtemps impensées, font évoluer l’accompagnement ; là où se créait du surhandicap, faute d’attention suffisante à l’émergence des capacités des personnes, faute d’outils pour les accompagner, on voit avec émerveillement une réflexion sur ces mêmes capacités, des outils de communication de plus en plus adaptés ; on voit poindre une scolarisation, des apprentissages tout au long de la vie . 

Cependant, ce n’est pas parce que l’on construit de nouveaux modèles qu’il faut déconstruire les précédents. Et il s’agit de ne pas ignorer les plus démunis, ceux qu’il faut aller chercher, ceux qu’on néglige parfois tant le temps est long pour des progrès minuscules…. 

Les politiques publiques nous proposent des modèles qu’il nous faut retravailler pour qu’ils gardent leur sens auprès des personnes polyhandicapées. La recherche d’autonomie, si petite soit-elle, l’autodétermination, même dans les plus petites choses de la vie, la citoyenneté, le droit d’avoir un avis et de le faire valoir doivent se travailler inlassablement, notamment quand le droit commun trouve ses limites.  

Quelle autonomie pour des personnes si dépendantes, qu’est-ce que l’autodétermination pour des personnes qui ont des capacités cognitives différentes, qui n’ont pas accès au langage verbal et ne disposent pour s’exprimer que de leur corps ou les moyens que d’autres mettent à leur disposition ? 

Qu’est-ce qu’une citoyenneté qui sans cesse a besoin d’avoir recours à une convention spécifique pour des questions aussi humainement essentielles que le choix du lieu de vie, choix qui aujourd’hui n’existe que bien peu ??  

Qu’est-ce qu’une inclusion, si différemment interprétée en fonction des interlocuteurs, qui demande encore tant de travail auprès du public ?  Qui demande tout autant de travail constant et soutenu auprès des pouvoirs publics, des décideurs, pour que ses modalités soient ajustées aux besoins et aspirations des personnes polyhandicapées et subordonnées à leurs propres choix ? 

Quelle est la valeur de l’égalité avec autrui, si elle se transforme en égalitarisme, et ne tient pas compte des choix et des aspirations de chacun, et de l’expérience de ceux qui les accompagnent ? 

Quelle est la valeur de l’innovation, si elle fait table rase de l’expérience plutôt que de la valoriser ? 

Ce sont ces questions, illustrées par de nombreux exemples d’innovations, que nous vous invitons à partager. 
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